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L’augmentation des prix des produits alimentaires en France, conjuguée à la prévalence de maladies chroniques liées à la consommation d’aliments de mauvaise qualité nutritionnelle avec un coût environnemental important, soulève des questions sur la compatibilité entre accessibilité économique, alimentation saine et durabilité environnementale. Alors que de plus en plus de consommateurs se tournent vers des produits « premier prix » dans les grandes surfaces pour faire face à l’inflation, il semble pertinent d’évaluer ces choix. Ainsi, cette étude vise à explorer la relation entre le prix et les variables nutritionnelles et environnementales de 352 plats préparés, proposés par trois distributeurs français (Intermarché, Carrefour et Leclerc). Le but est de fournir des informations pour nourrir la réflexion sur les politiques publiques qui visent la conciliation entre accessibilité économique et alimentation saine et durable.
Une alimentation de bonne qualité nutritionnelle permet la prévention de nombreuses maladies chroniques, telles que les maladies cardiovasculaires, le diabète de type 2, l’obésité, certains cancers, etc. Ces maladies sont aujourd’hui un enjeu majeur de santé publique, car très répandues et entraînant un coût important pour la société (Vernay et al., 2015). D’où l’importance de l’accès à une alimentation saine.
Mais qu’est-ce qu’une alimentation saine ? Le potentiel santé d’un aliment, défini comme la capacité à nous maintenir en bonne santé, ne se limite pas à la composition en nutriments, la structure de celui-ci compte aussi. En d’autres termes, au-delà des nutriments, il faut s’intéresser aussi à l’effet matrice des aliments/ingrédients à travers leur degré de transformation. Plus un aliment est dégradé et transformé, plus il perd en structure, en nutriments, et en interactions entre ses différents constituants (glucides, lipides, protéines, minéraux et vitamines), réduisant de ce fait son potentiel santé (Fardet, 2017). Par exemple, une pomme n’a pas le même effet sur l’organisme si elle est consommée entière, en purée ou en jus. D’où l’intérêt d’observer l’effet matrice, à travers le niveau de transformation des aliments.
L’approvisionnement de 62 % des Français provient des grandes surfaces1. Or, l’offre alimentaire proposée dans les rayons de grande distribution est composée à 70 % d’aliments ultratransformés (AUT) (Davidou et al., 2021). Ces aliments, composés d’ingrédients et/ou additifs isolés et purifiés, sont souvent riches en calories, en sucres, en sel et en graisses saturées, avec une forte incidence sur la santé humaine, principalement sur le développement de maladies chroniques (Debras et al., 2022). Par ailleurs, les AUT ne sont pas durables, du fait de leur fort impact négatif sur l’environnement, la biodiversité et le bien-être animal2 (Fardet et Rock, 2020). En outre, un des leviers d’action importants pour réussir la transition alimentaire dans les pays occidentaux est la réduction de la consommation de produits d’origine animale, ainsi qu’un mode de production plus agroécologique, incluant l’agriculture biologique (Saujot et al., 2023). En ce qui concerne l’alimentation biologique, 74 % des Français se déclarent sensibles à l’origine agroécologique de la matière première de leur alimentation. Pour autant, le bio reste encore un marché de niche représentant 6 % de la consommation des ménages en France (Agence BIO, 2024). Le scénario de crise du système alimentaire est aggravé par un contexte d’inflation, suite à la pandémie de Covid-19 et à la guerre en Ukraine. Les prix des produits alimentaires, en France, ont augmenté de 1,4 % en décembre 2021 par rapport à l’année 2020 et de 14,9 % en avril 2023 par rapport à l’année 2022, faisant de l’alimentation la première contribution à l’inflation globale3. Une des stratégies utilisées par le consommateur pour pallier cette hausse de prix est de se pencher vers des produits « premier prix » des marques distributeurs : ce marché a enregistré une augmentation de 19,7 % de ses ventes entre 2022 et 2023 (Fernandes, 2023). De plus, depuis 1960, la consommation de plats préparés s’accroît de 4,4 % par an en volume par habitant, qui se traduit aujourd’hui par l’achat de 18,50 kg/ménage/an. Le marché des plats préparés réalise 70 % de ses ventes en grande distribution. Ces plats, souvent évalués comme étant ultratransformés, se positionnent de plus en plus comme une alternative pratique et économique pour les Français (FranceAgriMer, 2020). Parmi les marques de plats préparés proposés en grande surface, deux groupes sont distingués : marques nationales, qui sont référencées dans toutes les enseignes (par exemple, Fleury Michon) et les marques propres de chaque distributeur (par exemple, marque Carrefour).
Ces plats préparés, proposés en grande distribution, répondent-ils aux critères d’une alimentation saine et durable ? Et à quel prix ? C’est ce à quoi tente de répondre cette étude.
Dispositif de recherche
Pour répondre aux questions posées ci-dessus,une étude quantitative a été mise en place.
Il s’agit d’une analyse détaillée d’une sélection de 352 plats préparés proposés par trois distributeurs français (E. Leclerc, Carrefour et Intermarché) qui, à eux trois, représentent 60 % du marché français de la grande distribution4. Les produits sélectionnés ont été classés en quatre sous-groupes :
→ plats cuisinés (par exemple : lasagnes, hachis parmentier) ;
→ soupes et veloutés (par exemple : crème de potiron, velouté de légumes) ;
→ pizzas et tartes (par exemple : pizza quatre fromages, quiche lorraine) ;
→ poêlées de légumes (par exemple : poêlée forestière, jardinière de légumes).
Les outils disponibles pour repérer les aliments sains et durables. Pour chaque produit, ont été relevés deux indicateurs afin d’estimer sa dimension « santé » : Nutri-score et NOVA ; et deux indicateurs pour estimer la dimension « durabilité environnementale » : label AB et Éco-score. L’objectif était ensuite de relier ces indicateurs au prix. Voici la description de chacun d’entre eux.
Le Nutri-score
Dans le but d’aider le consommateur à se repérer dans les rayons de supermarché, Santé publique France met à disposition l’outil Nutri-score permettant d’évaluer la qualité nutritionnelle des aliments. Ce logo n’est pas obligatoire, le choix de l’utiliser ou non revient donc aux industriels, ce qui réduit son efficacité. Ce score réunit les informations nutritionnelles pour 100 g de chaque produit et à travers un algorithme, il donne une notation à l’intention du consommateur, affichée sur les emballages. Il consiste en une échelle de cinq couleurs qui va de A, vert foncé, pour les plus favorables sur le plan nutritionnel, à E, orange foncé, pour les moins favorables.
NOVA
La classification internationale NOVA est utilisée principalement dans la recherche pour des études épidémiologiques, mais elle est disponible aussi en France dans quelques applications de scan des produits alimentaires, comme Open Food Facts5. Elle évalue les aliments en fonction de leur degré de transformation en les classant en quatre catégories : NOVA 1 — aliments bruts (par exemple : fruits et légumes, viande, etc.) ; NOVA 2 — ingrédients culinaires (par exemple : sel, sucre, huile) ; NOVA 3 — aliments transformés (par exemple : plats cuisinés, fromages, soupes) ; et NOVA 4 — AUT (par exemple : produits à base d’ingrédients reconstitués, comme viande reconstituée ; préparations composées essentiellement ou partiellement à partir de substances dérivées d’aliments, comme protéine de soja ; produits avec des additifs, qui modifient la couleur, le goût, l’arôme ou la texture des produits) (Monteiro et al., 2019).
Label AB (agriculture biologique)
Ce label est reconnu par L’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) et le ministère de l’Agriculture français comme étant un signe de qualité pour les produits fabriqués en France. Le cahier des charges de l’agriculture biologique repose sur une gestion agricole durable qui préserve la qualité des sols, de l’air et de l’eau et des écosystèmes naturels. Seuls les produits qui respectent ce cahier des charges peuvent afficher le logo AB sur leurs emballages.
Éco-score
L’Éco-score est un logo représentant l’impact environnemental des produits alimentaires. Cet outil utilise la base de données open source de l’ADEME, Agribalyse, pour une analyse complexe, multicritère de type analyse de cycle de vie (ACV).Il classe les produits en cinq catégories (A, B, C, D, E), de l’impact le plus faible à l’impact le plus élevé. Son affichage n’est pas obligatoire, mais il est disponible sur quelques applications de scan des produits alimentaires, comme Open Food Facts et Yuka.
Échantillon, source et traitement de données
→ Échantillon : il a été obtenu en faisant une première sélection de 400 plats en fonction de la disponibilité des informations (prix et valeur nutritionnelle) sur les sites web de chaque distributeur. Ensuite, une deuxième sélection a été faite en fonction de l’accès aux critèresNutri-score, NOVA et Éco-score disponibles sur le site Open Food Fact, pour arriver à une sélection finale de 352 plats. Ces plats sont issus de l’offre proposée par chaque distributeur au sein de ses rayons de plats préparés. Ainsi, il y a des plats provenant des univers « épicerie salée », « traiteur », mais aussi « surgelés ».
→ Source : en ce qui concerne les prix des produits, l’information a été relevée sur les sites officiels de vente en ligne de chaque distributeur. Les variables nutritionnelles (Nutri-score, NOVA) et les variables de durabilité environnementale (label A ou B, Éco-score) ont été relevées sur la base de données en libre accès Open Food Fact.
→ Traitement de données : les informations ont été organisées dans un fichier Excel, ce qui a permis de faire des croisements entre les différentes variables, afin d’obtenir les données qui permettent de répondre aux questions suivantes : les plats préparés proposés en grande distribution répondent-ils aux critères d’une alimentation saine et durable ? Et à quel prix ?
L’offre alimentaire étudiée est-elle saine ? Par rapport à la qualité nutritionnelle de l’offre analysée, il a été observé que 72 % des plats sont notés A ou B au Nutri-score (Tableau 1). Cela nous amène à penser que lorsque nous choisissons un plat préparé au supermarché, nous avons 7 chances sur 10 de choisir un produit dit sain si le seul critère à considérer est le Nutriscore. L’échantillon a été mis sous la loupe de la classification NOVA, qui montre que les plats préparés sont à 71 % ultratransformés (notés NOVA 4). Autrement dit, seulement 29 % sont des « vrais plats » (pas ultratransformés). Cela signifie qu’il y a, à peu près, les mêmes 7 chances sur 10, mais cette fois de choisir un AUT. Alors, comment s’y repérer ?
Ainsi, ces deux notations ne permettent pas, chacune, d’identifier les aliments sains. C’est la combinaison de ces deux critères, la composition nutritionnelle et le degré de transformation des ingrédients, qui définit un aliment sain. Il est donc nécessaire de croiser les deux scores pour identifier des aliments sains. Le tableau 1 montre que seulement 22 % des plats évalués sont sains. Autrement dit, favorables concernant les deux critères d’évaluation, Nutriscore et NOVA.
– TABLEAU 1. ALIMENTS SAINS PAR TYPE DE PLATS PRÉPARÉS
En ce qui concerne les différents types de plats préparés, les poêlées de légumes sont les plus performantes, avec 40 % de plats sains. Peut-être du fait qu’il s’agit de préparations culinaires simples, dont les ingrédients principaux sont les légumes, qui ont un bon profil nutritionnel, peu caloriques et riches en fibres. Par contre, les soupes, qui sont aussi des préparations culinaires simples dont les ingrédients principaux sont les légumes, sont seulement à 23 % saines. Car plusieurs d’entre elles contiennent des additifs de type texturant, exhausteurs du goût et arômes. Dans les deux cas, il s’agit de préparations qui sont censées être et perçues par le consommateur comme étant saines. Si les deux catégories sont globalement bien évaluées par le Nutri-score (91 % pour les soupes, 100 % poêlées de légumes), leur niveau de transformation, lui, diffère. Pour ce qui est des pizzas et des quiches, elles sont les moins performantes, avec 1 % de produits sains. Cela est dû en partie à leur profil nutritionnel, calorique, gras et salé, mais aussi à la qualité de leurs ingrédients, hautement transformés.
L’offre alimentaire étudiée est-elle environnementalement durable ?
Concernant les critères de durabilité analysés dans cette étude, il est observé que l’offre de plats préparés végétariens et non végétariens est équitable en termes de proportion. Ils représentent 53 % et 46 % de l’ensemble des plats préparés respectivement. Cependant, en ce qui concerne l’impact environnemental, évalué avec l’Éco-score, 73 % des plats non végétariens sont défavorables (notés D et E). Cela met en évidence le poids environnemental de l’utilisation de la viande comme ingrédient pour la formulation des plats préparés. En ce qui concerne l’ensemble des plats préparés, seulement un tiers est bien noté (34 % notés A et B à l’Éco-score), comme montré dans le tableau 2.
– TABLEAU 2. ALIMENTS ENVIRONNEMENTALEMENT DURABLES PAR TYPE DE PLATS PRÉPARÉS
Pour ce qui est de l’offre issue de l’agriculture biologique, elle représente seulement 11 % de l’ensemble étudié, ce qui montre le caractère de marché de niche de ce mode de production. Une différence peut également être observée au sein de l’offre, selon qu’il s’agisse de marques nationales ou de marques de distributeurs. Ainsi, Leclerc propose 24 % des plats en bio, suivi de Carrefour avec 16 %, Intermarché en propose 10 % et les marques nationales uniquement 7 %. Au moment de croiser les deux critères, Écoscore et agriculture biologique, il est observé que l’offre est encore plus restreinte. Seulement 7 % de l’ensemble de plats préparés sont durables environnementalement : ils sont bio avec un impact environnemental faible. Une observation plus détaillée a été faite par type de plats préparés. Ainsi, les poêlées de légumes sont ceux qui contiennent la majeure proportion de plats durables au niveau environnemental, avec 10 %, ce qui en fait la meilleure alternative à choisir parmi les plats préparés. Les pizzas et les quiches sont les types de plats dont l’offre durable est la plus restreinte, avec seulement 2 %, ce qui en fait les dernières options à choisir en termes de durabilité environnementale (Tableau 2). Mais qu’en est-il d’une offre saine et durable ? En combinant les 22 % de plats préparés sains et les 7 % de plats durables, on obtient seulement 3 % des plats préparés évalués qui répondent aux critères de plats sains et durables sur le plan environnemental.
Quel est le prix à payer pour une alimentation saine et durable ?
Lorsque nous allons au supermarché, nous avons tendance à regarder le prix au kilo pour comparer. Si l’on s’en tient uniquement à cette information, il est constaté que les plats sains (Nutri-score A ou B et pas ultratransformés) et durables (Écoscore A ou B et bio) sont plus avantageux sur le plan économique. Ceux-ci coûtent 1,8 fois moins cher au kg que ceux de moindre qualité nutritionnelle et peu respectueux de l’environnement. Par exemple, il est possible d’acheter 1 kg de légumes cuisinés à un prix très accessible, alors qu’acheter 1 kg de pizza coûte le double. En revanche, si l’on considère le prix par kilocalorie (kcal), c’est l’inverse qui se produit. Les aliments sains et durables coûtent 1,9 fois plus cher par kcal que les aliments de moindre qualité et qui ont un impact plus important sur l’environnement. En d’autres termes, les calories saines et durables coûtent deux fois plus cher que les calories vides6 et nuisibles à l’environnement (Tableau 3). Vu sous un autre angle, si environ 2 000 kcal/jour sont nécessaires pour couvrir les besoins énergétiques d’un Français moyen nourri à base de produits préparés, cela signifie que nous aurions besoin de 1 820 €/jour pour se nourrir de manière saine et durable (contre 920 € pour une alimentation peu saine et peu durable).
– TABLEAU 3. PRIX PAR KILOGRAMME ET PAR KILOCALORIE PAR GROUPE D’ALIMENTS
Les prix par kilocalorie peuvent subir de forts écarts. Cette étude montre des variations de prix entre 0,2 €/kcal et 2,8 €/kcal. Cela veut dire que certains plats peuvent être quatorze fois plus chers que d’autres. Comme montré dans la figure 1, cet écart peut varier en fonction du type de plat ainsi que du distributeur qui le propose. Alors que les plats sains et durables sont en nombre assez restreint et plus coûteux, il existe un compromis possible dans l’offre des différents distributeurs (Figure 2). En effet, certains d’entre eux proposent, à travers leur marque distributeur, des produits présentant un bon équilibre entre santé, durabilité et prix maîtrisé, notamment Leclerc et Carrefour, tandis que l’offre proposée par Intermarché et par les marques nationales est plus restreinte et à un prix plus élevé.
– FIGURE 1. PRIX EN €/KCAL PAR TYPE DE PLAT ET PAR DISTRIBUTEUR
– FIGURE 2. PROPORTIONS DE PLATS SAINS ET DURABLES PAR TYPE DE MARQUE ET PAR PRIX EN €/KCAL
Quel est le prix payé pour une alimentation issue d’un modèle agro-industriel dominant ? Le consommateur a été habitué à aller vers le prix le plus favorable, surtout en période d’inflation. Les prix bon marché proposés par les distributeurs ont des conséquences sur notre système alimentaire. Ils existent au détriment de la santé des personnes, ont un coût social et provoquent des dégâts environnementaux par la production de plats qui ne sont ni sains ni durables. Les ingrédients utilisés pour la fabrication des plats préparés ultratransformés, peu coûteux, doivent être disponibles toute l’année en plus de remplir des critères de sécurité sanitaire en termes de toxicologie et de conservation. Pour atteindre ces exigences, l’agriculture et l’élevage intensifs sont les plus répandus. En effet, les industriels utilisent des ingrédients et additifs alimentaires produits à partir du fractionnement de quelques espèces végétales et de produits animaux, ce qui permet d’atteindre des prix très bas. Ainsi, un sirop de glucose coûte dix fois moins cher que du sucre de table, et un arôme de fruit de synthèse est plus économique que de vrais fruits (Duru et Fardet, 2024). Dans ces conditions, la fabrication de produits moins chers devient une course entre les
différents industriels et les différents distributeurs. Une course qui à la fin coûte beaucoup à la société. Mais est-ce que payer plus cher pour une alimentation saine et durable est gage d’une meilleure répartition de la valeur ? Protégeons-nous vraiment la santé des hommes, et celle de la planète ? Pas sûr. Cette étude montre à quel point les prix peuvent varier par type de plat, par distributeur, sans forcément être plus sains ni durables.
Les politiques publiques qui visent l’accès à une alimentation saine et durable doivent être axées aussi bien sur le changement de comportement du consommateur que sur le changement de l’offre alimentaire proposée. Dans le premier cas, la politique phare en France est le Programme national nutrition-santé (PNNS 4) qui, dans sa dernière version lancée en 2019, préconise l’utilisation du logo Nutri-score pour repérer les aliments de bonne qualité nutritionnelle, pour réduire la part des aliments ultratransformés, ainsi que pour privilégier une alimentation issue de l’agriculture biologique (Réseau acteurs, 2023). Mais une question reste posée : est-ce que le consommateur a réellement le choix dans les rayons des supermarchés ? Lors de cette étude, il a été observé un manque d’outils disponibles pour réaliser les évaluations. En effet, le seul logo obligatoire est le label bio, qui est peu représentatif de l’ensemble de l’offre disponible (dans l’échantillon de cette étude comme sur le marché en général). Le logo Nutri-score, porté par Santé publique France, est censé aider le consommateur à faire des choix plus sains, mais il prête à confusion s’il est regardé de manière isolée. En plus, pour le moment, il n’est pas obligatoire, ce qui réduit la possibilité de comparer les produits d’un même rayon.
D’un autre côté, pour réguler l’offre alimentaire en France, la loi EGalim 2 a été adoptée en 2021. Son objectif est d’améliorer l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire. Cette loi vise à protéger la rémunération des agriculteurs et à réguler ainsi la chaîne de valeur (ministère de l’Agriculture, 2023). Néanmoins, à cette date, l’application de cette loi rencontre des difficultés, notamment pour la mise en place de la régulation de marges des prix par les industriels et les distributeurs, l’affichage obligatoire d’un logo environnemental, la régulation de l’utilisation d’emballages écoresponsables, ainsi que l’information relative à l’origine des ingrédients. D’autres pistes de politiques publiques peuvent venir en soutien et en complémentarité de ce qui est déjà mis en place en France, telles que la régulation de taux d’ingrédients ultratransformés, de sucres, de sel et de graisses saturées pour la fabrication des produits, la régulation du marketing de l’offre proposée, une taxe sur les produits ultratransformés ou une réduction de la TVA sur les produits sains et durables, une régulation de la proportion des produits bio proposés par les distributeurs. Qu’il s’agisse d’améliorer les politiques existantes ou de mettre en œuvre de nouvelles réglementations, ce qui est certain, c’est qu’il est nécessaire de progresser vers l’accès de tous à une alimentation saine et durable à un prix plus équitable.
Enfin, quelques points de vigilance sont nécessaires à considérer. Tout d’abord, l’analyse réalisée au cours de cette étude porte seulement sur des données quantitatives. Ces données ont été observées et analysées à un moment précis, ce qui signifie qu’elles sont sujettes à des évolutions de modes de fabrication et de prix fixés par les industriels et les distributeurs. En outre, le périmètre de l’étude porte uniquement sur l’univers « plats préparés », ce qui n’est pas représentatif de l’offre globale des enseignes citées dans l’étude. Toutefois, il est à espérer que cette étude servira à plaider en faveur de politiques visant à garantir l’accès à une alimentation saine et durable pour tous.