« Décloisonner les disciplines scientifiques sur l’alimentation et soutenir les différent·e·s acteur·rice·s du changement pour promouvoir des systèmes alimentaires plus durables »
La Chaire Unesco Alimentations du monde a été créée en 2011 par le Professeur Jean-Louis Rastoin (Montpellier SupAgro, aujourd’hui l’Institut Agro Montpellier) avec un groupe pluridisciplinaire d’enseignant·e·s et de chercheur·euse·s de diverses institutions du campus Agropolis. Elle a été labellisée par l’Unesco pour un premier cycle de quatre ans, puis à nouveau en 2015 et 2019.
Au fil des années, à travers ses activités, la Chaire a renforcé un certain nombre de convictions :
• l’alimentation est un enjeu majeur pour les sociétés : elle relie les humains entre eux et à leur environnement ; elle représente une composante essentielle de leur santé et celle de la planète, de leur bien-être et celui des autres vivants, du lien social et de la construction des identités culturelles. Elle est à la fois une activité économique, sociale, politique et artistique ;
• la formation et la recherche ont besoin de se donner du sens en s’inscrivant dans des enjeux de société ;
• les disciplines scientifiques doivent dialoguer avec d’autres formes de connaissances (professionnelles, artistiques, etc.) et avec les citoyens. Il faut ainsi décloisonner les savoirs.
Aujourd’hui, la Chaire organise le dialogue sciences-société pour l’alimentation durable à travers trois types d’activités :
• la formation : le Mastère Spécialisé « Innovations et politiques pour une alimentation durable (MS IPAD) et divers modules de formation, MOOC, etc. ;
• la recherche-action : les systèmes alimentaires urbains durables ; les solidarités alimentaires face à la précarité ;
• le décloisonnement et la diffusion des savoirs : parcours thématiques, publications, conférences…
L’alimentation est étudiée au travers de disciplines scientifiques de plus en plus spécialisées : nutrition, science des aliments, génie des procédés, économie, sciences sociales, etc. Avec des prismes de plus en plus fins, chacune de ces disciplines risque de perdre de vue l’ensemble des enjeux dont l’alimentation est porteuse.
De même, ces enjeux, bien que repris ensemble dans la thématique de l’alimentation durable, sont souvent traités de façon relativement cloisonnée, privilégiant soit une entrée environnementale, nutritionnelle, sociale, économique ou en termes de gouvernance.
La Chaire se positionne ainsi comme un espace permettant de retrouver une vision holistique de l’alimentation, non pas comme une méta-discipline intégrant tous les points de vue et les enjeux, mais comme un moyen de prendre du recul par rapport aux approches trop spécialisées, pour redonner du sens aux connaissances et réconcilier sciences et société.
La crise de la Covid-19 annonce probablement l’éminence de graves crises environnementales et sanitaires liées au changement climatique, aux pollutions chimiques, à l’effondrement de la biodiversité, à l’épuisement des ressources. Dans ce contexte, l’enjeu d’éviter une marginalisation sociale des plus vulnérables apparaît plus crucial que jamais, d’autant qu’il est souvent peu ou mal considéré dans les objectifs de durabilité.
La Chaire porte de ce fait un effort sur ces enjeux de solidarité alimentaires face à la précarisation, tant dans l’accès pour tou·te·s à une alimentation durable que dans les conditions de travail dans le système alimentaire. Elle cherche à relier ces dimensions socio-économiques aux dimensions environnementales, sanitaires ou de gouvernance. Elle expérimente, pour cela, des pratiques de recherches pluridisciplinaires co-construites et co-pilotées avec les acteur·rice·s des systèmes alimentaires.
De nouveaux systèmes alimentaires plus durables sont en construction, portées par des innovateurs sociaux, citoyens, collectifs, d’entreprises. Les identifier, les accompagner et les évaluer est nécessaire mais ne suffit pas pour accélérer la transition. La Chaire est convaincue qu’il faut aussi agir par des politiques publiques ambitieuses. Ceci rend nécessaire de modifier les rapports de force qui les influencent en faveur des acteurs porteurs de véritables préoccupations sociales et environnementales. La Chaire soutient ces acteur·rice·s du changement (professionnel·e·s, politiques, plateformes de la société civile, collectivités territoriales, etc.) par la production de ressources de référence et par des formations.
- Janvier 2021 -
Nicolas Bricas, chercheur socio-économiste de l’alimentation au Cirad (Moisa) et titulaire de la Chaire Unesco Alimentations du monde, co-directeur du Mastère Spécialisé IPAD
Damien Conaré, Secrétaire général de la Chaire Unesco Alimentations du monde, Institut Agro Montpellier